Gap. 60 000 Rebonds s’installe dans les Hautes-Alpes
Economie. Accompagner les chefs d’entreprise qui déposent le bilan est la première mission de 60 000 Rebonds. Accueillis dans les locaux de l’UPE05, les dirigeants de l’antenne Sud de l’association sont venus présenter leurs rayons d’actions et leur fonctionnement aux acteurs locaux du département.
Même si des structures venant en aide aux entrepreneurs en difficulté existent, il y a un espace vide pour ceux qui ont déposé le bilan. C’est le constat d’expérience qu’à fait Philippe Rambaud en 2012, année durant laquelle plus de 60 000 liquidations judiciaires sont recensées et qui lui ont donné l’idée de ce nom pour l’association, comme pour conjurer un sort. L’objectif est d’aider ces entrepreneurs à rebondir et retrouver un projet professionnel, cela se traduit par des étapes, souvent douloureuses, accompagnées par l’association et son armée de bénévoles. Solidarité, engagement, professionnalisme et bienveillance seront les fers de lance pour aider l’entrepreneur à retrouver confiance en lui pour rebondir.
En 2016 l’association, reconnue d’intérêt général, se structure et se déploie au niveau national pour soutenir les entrepreneurs après une liquidation. Aujourd’hui structurée en fédération qui rayonne sur 10 régions en métropole et aux Antilles-Guyane, 60 000 Rebonds dispose de 51 antennes avec 1 800 bénévoles et 36 salariés au service des entrepreneurs. Depuis 2012, l’association a permis à 1 650 d’entre eux de rebondir. L’association fonctionne avec un budget d’un peu moins de 3M€ auxquel s’ajoutent subventions et mécénats d’entreprise.
Un accompagnement gratuit au cas par cas
Frédéric Liotard, Vice-Président de l’association explique : « L’entrepreneur post-liquidation mettra en moyenne 7 ans pour rebondir s’il est seul. Nous avons fait le pari de l’aider à le faire en 2 ans. On l’accompagne individuellement avec un binôme. Un parrain ou une marraine bénévole qui est un cadre dirigeant ou un entrepreneur et un coach professionnel qui est là pour l’aider à se reconstruire ».
En effet, le coach professionnel va aider l’entrepreneur à faire le deuil de cette perte professionnelle, à faire le point sur sa responsabilité : « un entrepreneur est toujours responsable de ce qui lui est arrivé même si le Covid est passé par là, même si l’associé est parti avec la caisse, même si les clients ne paient pas… ce sont des déclencheurs » rappelle le Vice-Président.
Le projet de reconstruction professionnelle et sociale se réalise aux côtés du parrain professionnel soit par un retour à l’entrepreneuriat soit au salariat. Une configuration pas toujours évidente pour un entrepreneur qui n’a jamais postulé ou réalisé de CV : « on est à peu près à 50/50 sur le rebond à savoir que l’avantage du salariat remet tout de suite du beurre dans les épinards et permet de reprendre une activité tout de suite, quitte à reconstruire un projet entrepreneurial plus tard ». Dans un contexte ou le recrutement de personnel qualifié est sous tension : « il y a des pépites parmi les entrepreneurs post-liquidation ». Une situation qui dure en général 1 an au maximum avant la création d’une nouvelle entreprise.
L’association propose également un accompagnement collectif dans une communauté où il n’y a pas de jugement. « On ne va pas chercher les gens à la sortie du tribunal de commerce, ce n’est pas le bon moment. Ce sont les entrepreneurs qui viennent pousser la porte, c’est un acte volontaire ». D’où l’intérêt d’avoir des partenaires de proximité, d’être ancré dans le tissu économique bancaire et juridique local « pour que les entrepreneurs, les bénévoles et mécènes sachent que l’on existe ».
Changer de regard sur l’échec
Dépression, détresse, divorce, dissolution de ses biens personnels, honte… La solitude de l’entrepreneur qui a perdu son outil de travail peut aller très loin, jusqu’à la pire des issues, le suicide. C’est une triple sentence : personnelle, professionnelle et financière.
La deuxième mission que se donne 60 000 rebonds est de changer le regard sur la tragédie de l’échec : « on est tous dans le jugement dès le plus jeune âge, on est dans une culture violente face à l’échec qui est stigmatisé. Dans les pays anglo-saxon il est un master, un diplôme supplémentaire qui valorise une expérience. Ce regard sur l’échec est la sensibilité de tous, une bienveillance qui vise à ne plus condamner celui qui a échoué mais valoriser cette expérience ».
Voir l’échec comme une étape dans un parcours et non pas comme une fin, ne pas stigmatiser ceux qui ont osé se lancer est un combat de tous les jours pour changer de paradigme.
« Dans le parcours, ce n’est pas l’échec qui est interessant, c’est le rebond » !
Anna Fréjus
Source : Alpes & Midi